Matière et couleur à penser : du marbre au plastique, tout est fantastique.

18 juillet 2022

Épisode 2
10 ans, 10 maquettes, les noces d’étain entre Ars Longa et Accès Culture.
Après notre premier épisode, entrons maintenant dans la maquette, appréhendons sa forme et ses matières.

La forme suit la fonction

Maxime essentielle pour tout designer, la forme est au service de la fonction. Ici la fonction peut être ambiguë et parfois difficile à trancher. Est-ce que la maquette doit dire la vérité, c’est-à-dire se rapprocher au plus près de l’objet qu’elle représente, ou peut-elle mentir, pour simplifier ou apporter de la clarté au voyage entrepris par les mains des malvoyants ? Notre parti pris sur ce projet est de privilégier le voyage et l’imaginaire pour aborder la complexité architecturale du site. 

De la matière ? 

Et de la chaleur ! Si la plupart des maquettes tactiles sont généralement réalisées en plastique, pour des raisons techniques (mise en forme des matériaux, entretien, etc…), le choix d’Accès Culture est tout autre. La demande se porte très rapidement sur le bois, pour apporter de la chaleur et de la douceur sous les doigts. Pour Accès Culture, la médiation est d’abord un moment de partage où la maquette devient un outil de médiation et de conversation. Le matériau doit correspondre à la qualité de la rencontre voulue. Le bois constitue l’architecture principale de nos maquettes.

Accueillir les mains des visiteurs comme on reçoit des spectateurs pour une pièce de théâtre, tel est le pari de notre collaboration avec Accès Culture.

Le bois permet aussi d’ouvrir un éventail de textures et de sensations grâce au choix des essences, des procédés de fabrication (massif, contreplaqué, recomposé) ou de son traitement en surface (brut, poncé avec différents grains, huilé, etc…). Si le bois est chaud, il peut aussi gratter, absorber, accrocher, donner par son fil, une direction.

La maquette doit surprendre, interroger, compléter la narration du conférencier. Par exemple, les matières plastiques, froides et lisses créent des ruptures dans la navigation du doigt pour signifier des passage vers les extérieurs, vers un nouvel univers sensitif. Le plastique offre aussi une résonance différente de celle du bois et ajoute une nouvelle dimension sensible à la visite. Le son joue un rôle important sur l’ensemble de la visite tactile car il nous invite à prendre en considération la visite des autres qui a lieu en même temps. 

Tapis de danse, papier de verre, patins en caoutchouc, grille métallique ou encore feutrine  complètent notre éventail de matières. Nous jouons là encore sur le fil entre imaginaire et réalité. Si du matériau de tapis de danse est utilisé pour évoquer la salle de spectacles, le papier de verre pourra représenter les coulisses. Ce dernier évoque un espace inconnu pour le spectateur, un espace réservé, un espace non accessible, représenté par un fort contraste – une sensation désagréable, piquante – qui nous indique qu’en temps que spectateur/visiteur nous ne devrions peut être pas être là !

Ce nouveau vocabulaire de textures, qui s’affine et de s’étoffe au fur et à mesure des nouvelles maquettes, constitue une grammaire commune à l’ensemble de nos réalisations. D’une maquette à l’autre, un malvoyant pourra retrouver des similitudes dans notre grammaire des textures facilitant l’autonomie, la maîtrise et une forme d’indépendance dans sa visite.

De la couleur ?

Après avoir touché du doigt la question des textures, regardons le choix des couleurs.

La couleur, traitée en grandes masses, permet de donner des informations précieuses à son destinataire : se repérer et appréhender l’espace.  Elle permet aux autres visiteurs de suivre la balade sans obligatoirement toucher ou manipuler. La couleur est un outil puissant de médiation, même dans le cadre d’une médiation tactile. 

Enfin, la couleur joue le rôle de fil d’Ariane pour le conférencier ou le médiateur. En retrait, sans contact avec la maquette, il s’appuie sur les couleurs pour dérouler son récit, structurer son discours. La couleur posée sur des petits détails lui permet de ne pas oublier certains éléments à mettre en valeur, parfois petits et indispensables au récit.